Webzine Le Net Blues
-- Par: Réjean Nadon
courrier@lenetblues.com
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FestiBlues 2007
Nous sommes heureux de vous présenter cette d’entrevue réalisée avec l’un de nos géants du blues québécois, Monsieur Bob Harrisson. Pendant plus de quatre heures, Bob s’est prêté aux jeux de nos questions. Vous y découvrirez, pour grand nombre d’entre-vous, un long cheminement artistique parsemé d’aventures musicales de toutes sortes et qu'il répéterait encore et encore nous a-t-il confié.
 
Bob a été et est encore batteur, il a été producteur de grandes séries blues (Session Blues Session), il a été directeur d'un des plus grand cabaret de blues au monde, le Blue Berry de la rue St-Denis à Montréal et qui se nomme aujourd'hui le Medley, il a aussi été acteur à la télé de Radio-Canada, il a déjà eu un groupe (Dillinger), lorsqu'il était en Ontario et que le groupe RUSH était leur première partie.  Il a été batteur pour Willie Nelson, fait les quatre
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cent coups avec Gerry Boulet et cötoyer de grandes personnalités artistiques tel le grouge STIX.  Il a produit à 42 ans son premier album (Chevalier) qui comprend des titres tels,  Le Chat Dans Gorge composé pour lui par Plume Latraverse et une version vibrante de la chanson Ayoye d'Offenback.  Puis en 2006, l'album Bob Harrisson Live, un album acoustique avec l'harmoniciste Rick Weston.
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Il raconte sa descente dans l’enfer de la drogue pour enfin nous revenir avec plusieurs projets qui lui tiennent à cœur et qu’il aimerait lèguer aux générations futures. 

Bob nous dit avoir beaucoup de chose à faire et à nous dire en chanson...  Il espère avoir la santé afin d’arriver au bout de ses nombreux projets. En cette année 2007, il célèbre ses 50 ans de vie artistique. Plusieurs générations de musiciens ont profité de son expérience et de sa fougue sur scène. Il est encore aujourd'hui à 57 ans un éternel passionné de la musique. C’est aussi avec grand plaisir que Bob Harrisson a accepté d’être le porte-parole des Galas Lys Blues. Voici donc notre entretien avec ce grand musicien et gentleman, Bob Harrisson.
 

Bonjour M. Harrisson, si nous commençions par le tout début ?

Je proviens d’une famille de 7 enfants où tout l’monde jouait de la musique et c’est avec mon père Marius et ma mère Marie-Paule, qui sont toujours vivants soit dit en passant, que j’ai joué de la batterie professionnellement dès l’âge de six ans. Mon père, un multi instrumentiste était aussi un très bon organisateur et un maître de cérémonie hors pair. Il s’était vite aperçu que je jouais aussi bien que son batteur habituel et c’est pourquoi il m’installa à la batterie dès l’âge de six ans, les jours de noces. Il venait par la même occasion d’économiser $40.  Je me souviens à l’époque que nous avions reçu plus de 50 demandes en une seule soirée pour jouer dans les noces d'été. Nous étions très en demande. À l’âge de 7 ans je jouais tous les samedis de l’été avec mes parents et à 9 ans tous les vendredis et samedis soirs dans les bars. À 13 ans je commençais à voler les Gin & Tonic de ma mère sur le piano (hi hi). C’est aussi à cet âge que j’ai commencé à jouer de la guitare avec mon frère Jacques, nous étions en 1963, Jacques jouait du saxophone et notre autre frère Donald (père du batteur Sam Harrisson)  jouait de la basse. Nous avions remplacé à la volée les sœurs Galant à Télé 7 Sherbrooke.  Puis, j’ai voulu suivre l’époque et être chansonnier. Ceci amena beaucoup de friction dans la famille car mon père avait des engagements pour moi en tant que batteur et moi j’en avais d’autres en tant que chansonniers.
Bob Harrisson à la batterie accompagné de ses parents
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Bob organise un festival à Saint-Étienne (France)
Que dire de ton départ du Québec pour Toronto ?
À 17 ans je suis allé à Toronto et j'ai joué du Country. Ça fonctionnait bien là-bas, je ne parlais pas anglais mais avec des signes je me débrouillais. D’ailleurs, c’est un peu bizarre à raconter mon histoire qu’avec un nom anglophone comme Harrisson je ne parlais pas anglais. Je me souviens de m'être bagarré avec beaucoup d’anglophone à mon école de Cowansville. J’étais un des meilleurs bagarreurs, malheureusement. Je ne jouais pas au hockey et ne pratiquais aucun sport avec mes amis d’école, je jouais de la musique avec mes parents, alors il fallait que je me prouve devant mes amis… 

Pour revenir à Toronto, je me suis retrouvé au Horse Shoes Tavern où j’étais le batteur de l’orchestre maison. 

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C’était une grosse boîte à l’époque qui engageait de grosses pointures américaines dont Lucille Star, Bob Lumen, Willie Nelson entres autres. C’est là que Willie Nelson nous avait engagé pour une tournée Nord-Américaine avec lui. Puis je suis allé au Zenzy Bar de la rue Young, toujours à Toronto, comme batteur de l’orchestre  maison de cet établissement de musique Jazz.
 
-- Parle-moi du groupe Dillinger.
Avec mon frère Jacques, nous avons parti le groupe ‘’Dillinger’’. Nous avons fait 2 albums. C’était un groupe progressif jazz/rock un peu Heavy si je puis dire. Ce groupe a connu une certaine gloire durant au moins 6 années. Le groupe Rush faisait notre première partie et nous avons fait également la première partie du groupe Styx et de Bob Seagard aux USA. Je me souviens que nous étions très ‘’ Tight’’ comme groupe.  Nous pratiquions 8 heures par jour et le soir souvent nous étions sur scène. 

C’était l’époque des Jethro Tull, Genesis et nous suivions les rythmes de l’époque. Par contre, nous avions oublié les racines du blues. Pourtant ces racines avaient fabriqué les géants de la musique mondiale tel les Rolling Stone ou Led Zeppelin pour ne nommer que ceux-là. Nous on se concentrait sur des techniques musicales plus complexe. Puis la magie de Dillinger s’estompa, ça me prenait un changement dans ma vie.


 
 
C'est à ce moment que tu es allé faire un tour à Terre-Neuve ?
Je me suis retrouvé à Terre-Neuve dans un  grand spectacle bien connu de la télévision et des musiciens, le 90 minutes Night Live. J’étais diffusé à travers le Canada sur les ondes de la CBC (Radio-Canada anglais). C’est là que j’ai vraiment commencé à faire de l’argent si je puis dire. Tu imagines à l’époque on me payait $1,400. Je ne veux pas paraître prétentieux mais, dans cette province le monde m’écoutait. Je vous donne en exemple ce certain soir où j’étais entrain de prendre une p’tite bière dans un club et j’ai dit au propriétaire de l’endroit qu’avec son deuxième étage il pourrait faire un p’tit bar de jazz, le propriétaire m'a simplement dit: Okay. La semaine suivante j’ai fait le ''stage'' manuellement et puis voilà le club était lancé, aussi simple que ça. En l’espace d’une seule conversation j’étais devenu le gérant du nouveau bar de Jazz.  Le premier samedi, la salle était comble, puis j’ai ajouté des soirées Folk, car là-bas cette musique était très en demande, puis une soirée avec des conteurs de l’endroit et bien en moins d’un mois le petit club du deuxième était plein à l’année. Assis au même bar un autre soir, je jase avec quelqu’un de Radio-Canada  qui s’occupe d’une émission pour enfants Skipper & Company.  Je lui propose un billet dans son émission afin de donner des cours
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de français et qui parleraient de façon humoristique à Skipper afin de lui apprendre la langue de Molière. Le gars en question dit, okay.  Je me retrouve donc le samedi matin à cette émission avec son scénario d’acteur en tant que le professeur, Henry Lachance. Je suis alors propriétaire d’une très grande maison avec 5 chambres à coucher. Nous étions souvent en party dans la cabane. Puis tous mes contrats se mirent malheureusement à dégringoler et ma vie financière pris du recul, c’est alors que je reçoit l’appel de Breen Leboeuf. J’étais bien heureux de revenir au Québec, après 12 ans d’absence, pour accompagner le prestigieux groupe Offenback, c'était en 1979.  J’ai donc participé aux albums Coup d’Foudre, Rock Bottom, En Fusion et quelques retouchages sur l’album Traversion.
 
 
-- Quelle était ta relation avec Gerry Boulet ?
Je me souviens de Gerry quand il était très jeune. Il était dans une fanfare où il était tambour major à Frelighsburg près de St-Jean et moi à Cowansville. Il venait à l’occasion jammer chez ses cousins les Laliberté qui étaient nos voisins. Il y avait souvent des échanges musicaux entre nos voisins, Gerry et son frère. Nous nous sommes revu que beaucoup plus tard   avec Offenback, sans que Gerry ne fasse le lien. Moi et Gerry étions très près comme amis. On couraillait la galipote assez souvent ensemble, un peu trop même.  La droque, la bière, le sexe, je crois que son épouse Françoise m’en tient rigueur même encore aujourd’hui. Une sacré époque Rock & Roll… Avec Offenback on a fait de gros show dont deux au Forum de Montréal, à Sherbrooke, un autre à Ottawa, au lac St-Jean mais par la suite presque plus rien. La compagnie de disque nous dédommageait à toutes les semaines ($350) mais on ne jouait presque plus. Offenbach était un vrai groupe de Rock.. C’est avec le groupe que j’ai connu la couleur Blues. Je me suis mis à gratter la guitare et chanter. C’étais pas mal mon affaire, alors j’ai monté un duo accompagné de Breen Leboeuf et d'une trentaine de morceaux . Nous avons présenté ce spectacle à Cowansville.

Qu’est-ce qui t’a amené à aimer le Blues?
Quand j’ai vu les Blues Brothers la piqure m’a vraiment touchée. J’ai alors engagé le grand Vic Vogel pour me monter des partitions d’un Big Band avec des cuivres. Puis j’ai ajouté les guitares, batterie, orgue B3, basse, piano afin d’interpréter des pièces des Powder Blues Band, Downchild Blues Band, les Blues Brothers etc. 

C’est en 1981 que le Bob Harrisson Blues Band est né.  Un band qui commença en lion au Grand Café avec la crème des musiciens de Montréal. Depuis ce temps, je suis à l’avant plan avec mon groupe et c’est à partir de là, que j’ai démarré les Session Blues Session Bob Harrisson et que j’ai participé 23 ans d’affilé au festival de Jazz de Montréal dont celui de l’été 2007 avec un show à la Place des Arts soulignant mes 50 années de vie artistique.
 
 
 
 

Vidéo - Solo de batterie 1992

 
 
-- Les Sessions Blues Sessions Bob Harrisson
Ce fut un grand moment pour le blues à Montréal je crois bien. Avec notre seul et unique commanditaire Labatt Bleue, quelques 250 musiciens et musiciennes avaient été engagé. J’ai fait des soirées mettant en vedette des noms tel, Lulu Hughes, Paul Deslauriers, Stephen Barry, JD Slim, Jim Zeller, Carl Tremblay, Dan Bigras,  s'était en 1993.  Bill Deraime, John McGale, BlueSteel, Manon Brunet, Rick Dopera, Wang Dang Doodle, en 1994. Rick L Blues, Gina Seram, Dean Cottril, Michael Jerome Browne, en 1995. Des soirées très spéciales avec 4 pianos et le concours de la relève.

 
 
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MP3 - Something you got
As-tu déjà suivi des cours en musique ?
Je suis autodidacte, ce que j’ai appris c’est en jouant avec d’autres excellents musiciens qui m’ont nourrit de leur science. Quand j’écoute la musique, je sépare tous les musiciens d’un album et je les écoute les uns après les autres. C’est inné chez-moi. Par contre, j’éprouve une certaine difficulté en tant que chanteur à retenir les paroles d’une chanson. Je suis plus musicien que chanteur. J’entends la musique mais les paroles pour moi c’est un air de musique. Je vous donne en exemple la chanson Câline de blues d’Offenbach que j’ai joué avec le groupe pendant quatre ans et dont j’ai été obligé d’apprendre le texte lorsque j’ai voulu l’interpréter. Maintenant, je mets de l’expression et de la couleur aux paroles un peu plus. Je  me considère bien meilleur chanteur qu’auparavant.

Qu'est-ce qui t’amuse à part la musique ?
Je suis cruciverbiste ! Tous les matins je fait mes mots croisées, je fait même les grandes pages de certains journaux.  J’aime ben ça.


 
La drogue ?
Tu sais Réjean, je ne suis pas trop fier d’en parler mais oui, la cocaïne j’en ai fait pendant plusieurs années. C’est une chose qui a vraiment existé dans ma vie comme dans celle de beaucoup de musiciens. Quand tu es sur la coke tu deviens plus égocentrique et cet état me dérange un peu plus maintenant que je n’en prends plus, depuis bientôt un an. Je dois une fière chandelle à mes amis et surtout à ma compagne Suzanne qui m’a aidé à changer tout ça.

Parles-nous de tes projets ?
J’ai changé beaucoup de choses dernièrement dans ma vie. Plus de drogue, j’ai changé mon alimentation et je veux surtout assurer mes vieux jours avec une touche de satisfaction personnelle. J’ai connu la phase électrique avec de gros orchestre. Maintenant à 57 ans je préfère le côté acoustique. Je me sens plus à l’aise ainsi, je chante mieux maintenant, je peux communiqué avec le public plus facilement avec cette formule, je développe aussi un p'tit côté humoriste qui va avec l’humeur de la soirée. On peu appeler ça en français, un Blues de Cuisine. Présentement, j’ai deux bons musiciens qui jouent avec moi, le guitariste Dan Marcelais et le bassiste Sylvain Bertrand. J’aimerais ajouter un percussionniste pour mettre un peu plus de piquant mais sans être trop électrique. J’aimerais faire un album avec ce concept et participer aux Lys Blues en tant que Porte-parole, ce sont deux choses qui me tiennent vraiment à cœur pour l'instant et que je serais bien fièr de participer.

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Merci M. Harrisson!

Réjean Nadon
 
 



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